SOLEIL ET PEAU : "Du joli bronzage au cancer invasif"
Dossier Pédagogique pour l'enseignant

Dr. H. VAN LANDUYT, Dr. E. QUENCEZ et ASFODER - FAQSV - SOLEIL
Association des Dermatologues de Franche Comté

 

L'âge moyen de la population dans les pays développés augmente régulièrement.
En raison de l'augmentation de la population des sujets du troisième âge, le médecin est confronté plus souvent aux problèmes médicaux qui sont liés au vieillissement. Les dermatoses sont fréquentes et certaines sont spécifiques de cette population. Il est nécessaire de connaître ce spécificités, le mode de prise en charge et la prévention.
Les modifications sociales, vis à vis du soleil, qui ont débutées dans les années 1950 (bronzage et congés payés) sont responsables d'une augmentation croissante des cancers cutanés. Ils surviennent chez des sujets de plus en plus jeunes et le taux de mortalité est croissante. Il faut dépister précocement ces lésions et surtout changer radicalement les habitudes solaires de l'ensemble de la population.
Dans le cadre de la prévention secondaire, tous les médecins doivent dépister et traiter précocement les lésions précancéreuses et les carcinomes cutanés débutants.

LE VIEILLISSEMENT CUTANÉ :

Il associe des phénomènes intrinsèques régis par la génétique et le climat hormonal à des phénomènes extrinsèques liés à l'environnement (soleil, tabac, pollution...).

On observe des modifications de structure et de fonction au niveau :
- de l'épiderme : amincissement, fragilité, pigmentation.
- du derme et de l'hypoderme :
diminution du tissu élastique et adipeux --> rides.
fragilité vasculaire --> couperose, purpura, ecchymoses
- des annexes cutanées : hyposudation et diminution du sébum --> prurit, eczéma
- des phanères : fragilité, altération des ongles, chute de cheveux...

Le vieillissement est un processus physiologique normal. Notre société le considère comme une maladie. D'énormes intérêts économiques sont en jeu.
La lutte contre le vieillissement cutané fait appel à des traitements généraux et locaux. La prévention est encore trop souvent négligée et insuffisante vis à vis des éléments extrinsèques (protection solaire). Chez la femme grâce au traitement hormonal, on peut lutter contre le vieillissement intrinsèque.

TUMEURS PRÉCANCÉREUSES ET CARCINOMES :

Les kératoses actiniques ou kératoses séniles :

Elles sont secondaires à l'action cumulative du soleil. Elles peuvent dégénérer en carcinome spinocellulaire.
Cliniquement, les lésions débutent par de simples croûtes superficielles, saignant au contact, sensibles et parfois prurigineuses. Elles évoluent vers des lésions kératosiques pouvant évoluer vers des excroissances de plusieurs centimètres : corne cutanée.
Le traitement de ces lésions est impératif : azote, curetage ou pommade 5FU. Les récidives sont fréquentes. Une surveillance stricte s'impose.

Le carcinome spinocellulaire :

C'est une tumeur plus rare mais plus grave qui est lymphophile et qui métastase à distance. L'évolution est rapide.
La lésion primitive peut être une kératose actinique, une cicatrice chronique...
L'aspect clinique est polymorphe : lésion croûteuse rebelle, lésion verruqueuse inflammatoire, lésion ulcérée infiltrante.
Les lésions muqueuses sont plus rapidement évolutives et invasives.
Le traitement chirurgical doit être précoce et impératif. La chirurgie large est le seul traitement de référence. Un curage ganglionnaire s'impose au moindre doute. La curiethérapie et la radiothérapie sont des traitements de seconde intention.

Le carcinome basocellulaire :

C'est la tumeur cutanée maligne la plus fréquente. Il est également induit par le soleil et siège surtout sur les zones photoexposées. Il débute par une lésion à type de perle typique et s'étend progressivement par une bordure surélevée. C'est un etumeur à malignité locale. Elle ne métastase pas à distance. Sans traitement, elle peut "dévorer" et détruire un visage sans aucune douleur.
Le traitement est indispensable pour éviter les évolutions délabrantes. L'âge du patient ne soit pas être in facteur limitant.
Le traitement repose sur la chirurgie avec contrôle histologique. La cryochirurgie est réservée à certains patients (anticoagulants, pace maker...).

Le mélanome :

C'est la tumeur cutanée maligne la plus grave, de plus en plus fréquente (incidence multipliée par 2 tous les 10 ans).
Il peut s'agir de la transformation d'un naevus (grain de beauté) mais le plus souvent, il s'agit d'une lésion de novo. C'est classiquement une lésion noire irrégulière dans sa forme, sa couleur...
La lésion subit une extension superficielle progressive et secondairement peuvent apparaître des lésions nodulaires tumorales signant le caractère invasif. Une chirurgie large doit être précoce. Dans les formes évoluées, les métastases à distances sont fréquentes. Les traitements (radiothérapie, chimiothérapie) sont peu efficaces.

CONCLUSION :

Les manifestations cutanées secondaires au soleil sont de plus en plus fréquentes et de plus en plus graves chez des patients de plus en plus jeunes. La recherche des crèmes miracles et les chirurgies réparatrices de plus en plus agressives semblent paradoxales et impuissantes vis à vis de l'irradiation solaire croissante et inconsidérée.

Les cancers cutanés sont les cancers les plus fréquents. Ils sont responsables de délabrements cutanés graves et invalidants. Dans les années 2030-2040, ils pourraient représenter la première cause de mortalité par cancer chez les moins de 45 ans. Un changement radical des habitudes solaires permettra de diminuer leur fréquence. il faut informer le public et sensibiliser les jeunes générations.

Si la prévention primaire reste primordiale, le médecin occupe une place prépondérante dans le cadre de la prévention secondaire des cancers cutanés. Seul un dépistage précoce des lésions précancéreuses et un traitement précoce des carcinomes débutants pourront modifier le pronostic et limiter les effets délétères des cancers cutanés. Seuls un dépistage et un traitement précoces permettent la guérison.
Tous les partenaires médicaux : médecins, pharmaciens, infirmiers doivent apprendre à dépister les lésions à risque et orienter rapidement les patients.

Dans le cadre de la prévention primaire, le médecin ne doit pas ignorer chez des patients souvent polymédicamentés et souvent encore actifs (marche, promenade du week-end), le risque de toxidermie à type de photodermatose parfois très graves (aggravation, multiplication des effets néfastes du soleil par un médicament (comprimés ou application locale)).

Les crèmes solaires ne sont pas des protections suffisantes, elles sont utiles, mais elles ne doivent pas augmenter le temps d'exposition, ni remplacer les protections vestimentaires. Chez les enfants, on proposera des écrans minéraux ou des produits avec des filtres photostables adaptés aux enfants.

La prévention primaire doit être précoce. Il faut intervenir très tôt pour changer radicalement les habitudes solaires des jeunes générations. Une information de "masse" sera plus efficace. Les enseignants occupent une place importante pour initier ou prolonger notre message.