Le minerais de fer sidérolithique de Bethoncourt

 

 

Une importante activité minière a vue le jour dans la forêt de Salignonsal, située au Nord de la commune de Bethoncourt.

 

L’exploitation du minerai de fer, née au début du XVIème siècle, a connu son  apogée au XIXème siècle en alimentant les hauts fourneaux de Chagey et d’Audincourt. En 1884, la production atteignait  43 000 quintaux métriques de l’époque (environ 2 000 tonnes). La fermeture du haut fourneau d’Audincourt en 1886 mis fin à cette exploitation.

Des lapiaz et des cavités karstiques, développés sur des calcaires du jurassique supérieur, vidés de leur remplissage de minerai de fer, témoignent encore de cette activité.

 

Le minerai de fer se présente sous forme de grains plus ou moins sphériques (encore appelés pisolithes) noyés dans une gangue d’argile. La taille de ces grains varie de 1 à 20 mm de diamètre et leur teneur en fer varie entre 40 et 70%. Ils résultent d’un concrétionnement en couches concentriques.

 

L’exploitation se faisait soit par simple grattage superficiel du sol (on parle également de « picotage) soit par évidage de conduits karstiques.

 

Des cheminées d’aération ou d’extraction du minerai sont encore visibles aujourd’hui.

 

Le minerai extrait était ensuite transporté dans des « lavoirs à mine » pour le débarrasser de sa gangue argileuse.

 

Des vestiges d’un ancien patouillet, construit sur la Lizaine au lieu dit « Les Grandes Ragie », sont encore visibles entre Bussurel et Bethoncourt.

Il existe également un minerai de fer pisolithique à gangue calcaire.

 

L’exploitation se faisait à ciel ouvert, le long d’un front de taille. Les pisolithes étaient dégagées, sur place, de leur gangue calcaire par concassage.

 

Jusqu’à la fin du XIXème siècle on attribuait une origine volcanique à ce minerai de fer : il se serait formé dans des « sources thermales d’eau chaude ». On parlait alors « d’épanchements sidérolithiques ».

 

Maintenant, nous savons que c’est un minerai de fer résiduel de type latéritique d’âge Eocène, piégé dans des calcaires karstifiés du jurassique supérieur :

Durant tout le Jurassique, la Franche Comté, ainsi que les Vosges sont en domaine océanique ; une sédimentation détritique puis carbonatée se dépose dans une mer peu profonde.

Dès  le Crétacé, un bombement tectonique précoce soulève la région. Sur ce plateau faiblement émergé, une végétation de type tropicale va se développer.

 

Les mouvements orogéniques ont provoqués des cassures dans les calcaires stratifiés. Dans ce réseau de diaclases, l’eau chargée de dioxyde de carbone, mais aussi d’acides humiques, vont stagner et dissoudre les carbonates de calcium.
Les fissures s’élargissent et des cavités karstiques se forment dans les terrains du Jurassique supérieur.

 

A l’Eocène des sols d’altérations ferrugineux de type latéritiques apparaissent. Dans  ces conditions, les oxydes de fer forment des concrétions millimétriques à centimétriques, plus ou moins sphériques : les pisolithes.
Ces matériaux, ainsi que les argiles de décarbonatation, ont été ensuite remobilisés par l’érosion et redéposés dans les poches karstiques creusées dans les calcaires du Jurassique supérieur. Ce sont ces argiles sidérolithiques que nos aïeux ont exploitées entant que minerai de fer.

 

Dans le Pays de Montbéliard, l’exploitation du minerai de fer est ancienne : peut-être a-t-il été utilisé par les hommes de la préhistoire puis les Gallo-Romains ? En 1440, des minières auraient été exploitées, dans les environs de Montbéliard, pour alimenter un fourneau à Audincourt. (D. Vieille, M. Daudey)

Contejean, sur sa carte «  géologique des environs de Montbéliard » localise des terrains sidérolithiques à Nommay, Bethoncourt, Bussurel, Sainte Suzanne, Montbéliard, Courcelles, Exincourt, Audincourt, Beaucourt.

 

Des hauts-fourneaux, produisant la fonte au charbon de bois, existent en effet depuis longtemps dans la région et, sur la carte établie par Schirckhard en 1616, des mines de fer « Eisen Ertzgrüob » sont signalées au nord de Grand-Charmont. (D. Vieille, M. Daudey)

 

Audincourt à sa rue des mines qui se prolonge sur Exincourt. Dans les deux localités, comme dans toute la région, on exploitait autrefois un minerai de fer de bonne qualité. Celui-ci était utilisé par les forges d’Audincourt pour fabriquer des fers qui avaient une excellente réputation. (D. Vieille, M. Daudey)
Au rond-point des Forges, « Le décolleur de tôles », sculpture réalisée par Sonia Brissoni, est un hommage aux forgerons de la cité Audincourtoise.

 

Ce minerai de fer, avec l’eau, le bois comme sources d’énergie et des hommes entrepreneurs, est donc intimement lié à l’activité industrielle et à la prospérité du Pays de Montbéliard.

 

Bibliographie :
- L’exploitation du minerai de fer dans le karst des plateaux du Jura. Les mines de Béthoncourt et Onans (Doubs, France) de :
Denis Morin, U.P.R ; CNRS A 0423 Paléométallurgie du fer et Cultures-Institut Polytechnique Sevenans.
Patrick Rosenthal, Laboratoire de Géologie structurale et appliquée, UFR Sciences F-25030 Besançon Cedex et U.P.R. CNRS A 0423

- Les anciennes mines de fer de la région de Montbéliard. Exposition réalisée par l’AMFA. Audincourt : 15-16 septembre 2001. D. Vielle, M. Daudey